Il est 16 h 30. Démarré à 12 h 45 la lutte a duré 3 h 45. Nous sommes fatigués mais rayonnants.
Le retour se prépare, l’heure ne permet pas d’autres tentatives et nous sommes bien trop pressés de ramener notre prise.
Bernard lance à la mer les centaines de sardines qui restent ; les mouettes investissent rapidement les lieux et se disputent ce festin gratuit.
Il faut d’abord récupérer l’ancre. Jean nous prouve ses connaissance en navigation : il doit calculer notre route en fonction du point où nous nous trouvons et celui où j’ai largué l’ancre. Nous constatons que nous avons dérivé de 4 milles. Que de kilomètres parcourus quand on additionne toutes les manœuvres effectuées pendant ces 3 h 45 !!!
Nous rejoignons l’endroit, deux bateaux y pêchent encore à proximité. Nous rattrapons notre bouée, Jean passe son cordage dans sa boucle pour l’attacher au bateau. Il rejette la bouée et nous partons dans le sens inverse du courant. Cette technique permet de décrocher l’ancre et de récupérer une bonne longueur de cordage. Il suffit alors de remonter l’ancre et je m’y colle en tirant de bon cœur au début mais en y laissant le reste de mes forces.
Nous rentrons en contournant les pêcheurs qui restent ; ils nous font des grands signes d’amitié quand ils aperçoivent l’arrière du bateau. Jean donne le cap à Bernard et nous filons droit sur la Grande Motte.
Jean essaie de communiquer par radio avec ses amis pêcheurs mais n’y parvient pas. Nous recevons pourtant des émetteurs assez lointains mais toujours les mêmes : « Appel à tous ! Appel à tous ! » et la météo nous informe du temps qu’il fait.
Après une heure de parcours, nous pénétrons dans une brume de plus en plus épaisse. Nous passons des sweats, Jacqueline reste sur le siège de conduite et je m’occupe en suivant notre route sur le GPS et la carte marine. Au passage de la ligne de migration des thons, mentionnée « Bouée de Sète » sur la carte nous passons au milieu d’une centaine de mouettes qui, ayant trouvé de la nourriture, ne s’enfuient même pas au passage du bateau.
Bernard nous explique que quand les bancs de sardines sont trop en surface, un des thons qui les chasse les rabat avec de grands coups de queue pour que le banc descende. Les autres thons peuvent ainsi se régaler de même que les mouettes qui récupèrent les sardines tuées en surface.
Comme je suis attentivement notre progression au GPS et sur la carte, j’avertis Jean que nous sommes dans le dernier mille donc proche de la côte. Dans la même minute, une jetée sort du brouillard devant nous : nous sommes arrivés à 50 mètres de l’entrée de notre port. J’ai une petite pensée pour le voilier que nous avons doublé, il y a peu de temps dans la brume : ce sera moins facile pour lui.